
Le titre de l’édition française : Altamont 69 : Les Rolling Stones, les Hell’s Angels et la fin d’un rêve
Le titre de l’édition originale : Altamont : the Rolling Stones, the Hell’s Angel’s and the Inside Story of Rock’s Darkest Day
La date de parution : 2016 (Edition française : 2017 – Traduction: Stan Cuesta)
L’éditeur français: Payot & Rivages
Le genre : Film catastrophe.
L’auteur : Joel Selvin.
C’est qui ?: Un journaliste américain
Ce qu’on en pense:
Comment expliquer un tel foirage ? Un événement souvent qualifié comme étant « le jour où les sixties sont mortes » ? (C’est faux, la réalité étant bien sur plus complexe, mais bon, quand on tient une bonne formule…)
Trois lignes du livre semblent résumer toute l’affaire : « Pour la première fois Mick Jagger peut envisager un futur où les Rolling Stones sont plus grands que les Beatles. Et c’est une vision grisante. »
En effet, à ce moment précis de leur histoire, les Stones ont réussi à survivre au départ de Brian Jones (et même à sa mort) en le remplaçant par un p’tit jeune brillantissime : Mick Taylor, le groupe sonnant comme jamais. Après avoir foiré leur copie merdique de Sgt Pepper (Their Satanic machin etc….), le groupe va cesser de singer les Beatles et réussir à se réinventer avec la sortie de « Beggar’s Banquet » fin 68 (album où Jones fait encore partie du groupe). La révolution avait d’ailleurs débuté en mai 68 avec la sortie de « Jumpin’ Jack Flash », le single qui, à lui tout seul, fait qu’on leur pardonne d’être devenu le cirque Pinder. A partir de ce moment là, les Stones ne sont plus un simple groupe de Rock’n’Roll, ils l’incarnent carrement. (A notre connaissance c’est le seul groupe a avoir réussi ce genre de chose, ce qui explique probablement pourquoi ils sont devenus par la suite une marque à part entière, au coté de Coca-Cola ou Nike. Je sais, ça pique un peu, mais ça reste meilleur que Johnny Hallyday).
Donc….le 28 Novembre 1968, Jagger annonce, lors d’une conférence de presse en pleine tournée US, que les Rolling Stones donneront un concert gratuit à San Francisco, le 6 Décembre de la même année. Voulant faire taire les critiques qui commencent à le traiter de sale capitaliste, en raison du prix des places de concert (le double du tarif habituel quand même…), Jagger veut faire un geste cool, mais aussi, un peu sur les bords, un Woodstock à la gloire de son groupe. (En 1969, rien n’effrayait plus Mick Jagger que la possibilité de ne pas être cool. En 2019, il s’en fout, il a été anobli et il vous emmerde).
Le chanteur vient pourtant d’apprendre que le concert initialement prévu au Golden Gate Park de San Francisco ne pourra pas se faire, mais c’est pas grave, il reste huit jours pour trouver un autre site, tout baigne, je suis Mick Jagger des Rolling fuckin’ Stones.
Résultat : 300 000 personnes iront s’entasser sur une colline battue par les vents et, dans un froid de canard, essaieront d’apercevoir le groupe juché sur une scène d’un mètre de hauteur, gardée par des voyous ultra défoncés et armés de queues de billard…. Sans parler des quatre décès survenus, celui de Meredith Hunter, filmé par l’équipe de tournage, éclipsant les autres.
Puisant dans plus d’une centaine d’entretiens réalisés pour le livre, Joel Selvin retrace brillamment la genèse de la catastrophe, décrivant un groupe à l’entourage douteux et ayant entamé sa déconnection avec le monde des simples mortels (mais pas celui des banquiers). On ne reviendra pas sur les évènements bien connus : annulation du deuxième site 36 heures avant le concert, choix d’un nouvel emplacement ressemblant à une flaque d’huile rance, absence d’encadrement (ni police, ni sécurité), un « service d’ordre » assuré par des Hell’s Angels raides comme jamais, fuite du Grateful Dead qui refusera de jouer, agression du chanteur du Jefferson Airplane, meurtre de Meredith Hunter sous les yeux du groupe.
Comme en témoigne le film des frères Maysles Gimme Shelter, montrant les motards toxiques carrément sur scène et dévisageant le petit anglais gringalet, blanc de peur, mais tortillant tout de même des fesses en chantant qu’il est copain avec le diable (il faut au moins lui reconnaitre ce courage), on se doute qu’a ce moment là, Jagger à du avoir le sentiment de passer à la caisse. Son crossroads à lui.
Détaillé, pertinent et d’une lecture aisée, le livre pulvérise le masque du flower power, le groupe en prenant à juste titre pour son grade. Seule leur jeunesse pourra leur servir d’excuse. Et encore….