BLITZKRIEG

Le Titre : Live At The Star Club Hamburg

L’artiste : Jerry Lee Lewis

Le format : 33T/30 cm

La date de sortie : 1964

Le genre : Grosse décharge

C’est qui ?: Un voyou

Qui joue dessus ?: Jerry Lee Lewis and the Nashville Teens

Comment ca sonne ? : Wunderbar!

Qualité du pressage :

Excellente.

Bear Family Records – Réédition de  2010 – Pressage GER

Ce qu’on en pense :

Bon ben cette fois, ça y est. Sont tous morts.

Chuck Berry, Bo Diddley, Little Richard et récemment Jerry Lee Lewis. Ceux qui ont « écrit le livre » comme on dit. Vu l’état actuel de la production musicale, rayon rock’n’roll, on n’a pas fini d’écouter des vieux machins. Est-ce que c’est grave ? Non.

La musique rock porte en soi une forme de leurre, celui de la nouveauté. L’illusion que c’était la musique des jeunes. C’était en partie vrai dans les années 50, mais il s’agissait surtout d’un des attributs de la manifestation d’une nouvelle catégorie sociale, émergeante après guerre, celle des adolescents. Avant, c’était direct des culottes courtes au veston-cravate, avec passage par le service militaire, ça leur fera du bien à ces p’tits cons. Entre les deux, rien. Sauf pour les petits anglais, qui du coup auront tout loisir de jouer de la guitare et d’inventer la pop music, plutôt que d’aller se faire chier à la caserne. Le monde les en remercie.

Tout ça bien sur sans tenir compte des filles. Sauf que désormais les filles, en plus d’avoir la certitude qu’elle avait une âme comme les garçons,  avaient également un porte monnaie. Prêtes à se rendre chez le disquaire du coin (en fait plutôt des magasins d’électroménager, à l’époque) en disant au vieux en blouse derrière le comptoir: « Vous l’avez « Heartbreak Hotel » ? Vaudrait mieux, sinon avec mes copines on va tout casser chez vous».

Immersion dans le cerveau de Ruppert, cadre exécutif chez RCA en 1955 :

Ruppert : Dis donc, Bill, c’est quoi ce bordel avec ces blancs qui jouent de la musique de nègres? Sans dec, ça ressemble à rien…

Bill : T’inquiètes, c’est dans le Sud, c’est un truc de bouseux. Ça va leur passer à ces bourrins.

Ruppert : Ouais mais l’autre là, Elvis machin, il vend des carriolées de disques dans le Tennessee et quand il monte sur scène les filles font pipi dans leurs culottes. C’est bizarre quand même, non ?

Bill : T’inquiètes, j’te dis, c’est des conneries pour les gamins.

Ruppert : On se renseigne quand même, non? C’est quoi le nom du mec qui les enregistre dans son studio de pequenaud à Memphis ?

Bill : Sam Philips, un mec sympa. Attends, je l’appelle. Si les gamins veulent acheter ces conneries, t’as raison faut qu’on s’en occupe.

Jerry Lee Lewis était un artiste du label de Sam Philips (Sun Records), au même titre que Presley, Roy Orbison et Johnny Cash. Oui, oui, ces quatre là, sur le même label, au même moment. Heureusement que les faits sont irréfutables et historiquement établis, sinon les historiens du futur croiront à une blague.

Pas besoin de s’étendre sur la personnalité King Size de Jerry Lee Lewis (au hasard : mariage avec sa cousine de 14 ans, grande gueule, défoncé aux amphètes et crémation de piano live pour faire chier Chuck Berry qui refusait de passer avant lui sur scène). Sorti en 1964, mais enregistré en 1963, ce disque révèle une des particularité de cette musique: son effet de sidération.

Les lives, en général, c’est pas terrible, mais là c’est l’exception. La prise de son est excellente, d’une qualité étonnante pour un enregistrement des années 60. Le public étant mixé plutôt en avant (on entend même parfois tinter les verres) on « ressent » la salle. On voit littéralement les murs trembler et le club devenir le bastringue de l’enfer.

Ce concert est d’autant plus surprenant qu’il a été enregistré en Allemagne, dans un célèbre club du Reeperbahn, la rue de la soif d’Hambourg. Il était effectivement fréquent à l’époque que les clubs du quartier engagent des artistes anglo-saxons pour faire l’animation et rameuter les dockers au comptoir. C’est d’ailleurs comme cela que les Beatles apprendront le métier avant de revenir à la maison et de tout péter au Cavern Club. Vu l’enthousiasme du public, que l’on perçoit clairement sur l’enregistrement, on se dit que finalement les Allemands sont peut-être des êtres humains comme les autres.

Mais on assiste surtout à la performance d’un type dont on se demande s’il ne va pas s’embraser à la fin de chaque couplet. Les « grosses boules de feu » en vrai ! Accompagné d’un groupe terrible qui défonce tout, avec un guitariste (électrique bien sur) et un bassiste! Et pas des brêles, ce qui finit de grossir le son.

Les versions incandescentes de « Great Balls Of Fire », « Good Golly, Miss Molly », « Long Tall Sally » et « Whole Lotta Shakin’ Goin On » font de cet enregistrement un des plus grand live jamais publié. Un pur moment de rock’n’roll. Ne mettez pas trop fort, la peinture risque de se décrocher des murs. En fait si, mettez à fond, et laisser Jerry Lee Lewis faire tomber la foudre sur votre âme, pas grave pour la peinture.

La meilleure illustration de ce que veut dire Nick Cave quand il chante sur « Push the sky away » : « And some people say it’s just rock and roll / Oh but it gets you right down to your soul ».

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